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costume ecclésiastique, la cravate irréprochable et le crâne brillant ; Mme Barton, toute gracieuse dans sa robe noire nouvellement retournée.

« Voilà qui est charmant de votre part, dit la comtesse Czerlaska, en s’avançant à leur rencontre et embrassant Milly avec une élégance affectueuse. Je suis vraiment honteuse de l’égoïsme qui me fait demander à mes amis de venir me voir par ce temps affreux. » Puis tendant la main à Amos : « Et vous, monsieur Barton, dont les minutes sont si précieuses ! Mais je fais une bonne action en vous arrachant à votre travail ; je vous empêche de vous martyriser. »

Pendant ce temps M. Bridmain, homme un peu épais, souhaite la bienvenue avec une cordialité empesée. Il est étonnant combien peu il ressemble à sa sœur la comtesse Czerlaska, qui est vraiment très belle. Lorsqu’elle s’assit près de Mme Barton sur le sofa, les yeux de celle-ci s’arrêtèrent, faut-il l’avouer ? principalement sur la riche soie de teinte lilas rose (la comtesse portait toujours le soir des couleurs délicates), sur la pèlerine de dentelle noire et sur les barbes semblables retombant derrière sa petite tête ornée de tresses. Car Milly avait une faiblesse (c’était une jolie faiblesse de femme) : elle aimait la parure ; et souvent, tandis qu’elle travaillait comme une couturière économe, elle avait des visions chatoyantes du plaisir qu’elle éprouverait à porter elle-même de belles choses à la mode, par exemple des manches à ballon bien raides, sans lesquelles un costume féminin n’était rien à cette époque. Vous et moi, lecteur, n’est-ce pas, nous avons aussi notre faiblesse qui nous fait de temps en temps penser à des choses folles ? Peut-être nous complaisons-nous dans une