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ÉPILOGUE

Tel fut le roman de M. Gilfil, roman bien éloigné du temps où il était assis, usé et blanchi, près de son feu solitaire du vicariat de Shepperton. Les boucles brunes, l’amour puissant, la profonde tristesse, quelque différents qu’ils paraissent des cheveux blancs, du contentement apathique et de l’acceptation passive de la vieillesse, ne sont que les étapes de voyage d’une même vie ; de même que les riantes plaines de l’Italie, avec le doux addio des jeunes filles au passage, sont des incidents de voyage d’une même journée, qui nous amène de l’autre côté de la montagne, entre les sombres murailles de rochers et au milieu des voix gutturales du Valais.

Pour ceux qui n’ont connu que le vieux vicaire aux cheveux gris, faisant trotter sa vieille jument brune, il serait peut-être difficile de croire qu’il ait jamais été le Maynard Gilfil, au cœur plein de passion et de tendresse, qui poussait sa noire Kitty au galop le plus rapide sur la route de Callam ; ni que le vieux monsieur à la parole caustique, aux goûts champêtres et au costume négligé ait connu les plus profonds secrets de l’amour dévoué, ait lutté pendant des jours et des nuits d’angoisse et tremblé de son bonheur inexprimable. À la vérité, le Gilfil de ces derniers jours à Shepperton offrait plus de nœuds et de rugosités que n’en aurait pu faire présager le