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— Oh non ! il n’avait pas si grand tort ; il ne savait pas combien il me faisait souffrir. Comment aurait-il pu m’aimer comme je l’aimais ? Et comment aurait-il pu épouser une pauvre petite créature comme moi ? »

Maynard ne répondit pas, et il y eut un silence, jusqu’à ce que Tina dit : « Puis j’étais si fausse ! personne ne savait combien j’étais coupable. Le padroncello ne le savait, pas ; il m’appelait son bon petit singe ; s’il l’avait su…, oh ! comme il m’aurait trouvée coupable !

— Ma chère Tina, nous avons tous nos fautes cachées, et, si nous nous connaissions bien, nous ne jugerions pas les autres si sévèrement. Sir Christopher lui-même a senti, depuis que le malheur l’a frappé, qu’il a été trop sévère et trop obstiné. »

De cette manière, avec ces aveux entrecoupés et ces réponses consolantes, les heures passèrent de la sombre nuit jusqu’au froid crépuscule matinal, et de ce premier crépuscule jusqu’aux premières lignes dorées de l’aurore. M. Gilfil sentit pendant ces longues heures le lien qui unissait pour toujours son cœur à Caterina acquérir une nouvelle fraîcheur et plus de sainteté. Il en est ainsi des relations humaines qui reposent sur la sympathie de l’affection : chaque nouveau jour de joie ou de tristesse est un nouveau motif, une nouvelle consécration pour l’amour, qui se nourrit de souvenirs aussi bien que d’espérances — l’amour, pour lequel une répétition perpétuelle n’est pas une fatigue, mais un besoin, et pour lequel une joie non partagée est le commencement de la douleur.

Les coqs commencèrent à chanter, les portes à