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die. L’armure ne brillait plus au soleil, mais elle était suspendue mate et sombre contre le mur, et c’est là qu’elle avait pris le poignard. Oui, maintenant, tout lui revenait à l’esprit, tout ! et aussi son criminel projet ! Mais où est-il ce poignard ? Elle le cherche sur elle : il n’y est plus. Tout cela aurait-il été une illusion de son esprit. Serait-il tombé dans sa course ? Elle entend des pas dans l’escalier et se dirige précipitamment vers sa chambre, où, agenouillée près du lit, et cachant son visage pour fuir le jour qui lui fait horreur, elle essaye de se rappeler chaque sensation, chaque incident de la journée.

Tout lui revient ; tout ce qu’Anthony a fait et tout ce qu’elle a ressenti pendant ce dernier mois, et depuis cette soirée de juin où il lui parla dans la galerie pour la dernière fois. Elle se rappelle les orages de sa passion, sa jalousie et sa haine pour miss Assher, ses pensées de vengeance. Oh ! qu’elle a été coupable ! C’est elle qui a péché ! c’est elle qui l’a entraîné à faire et à dire des choses qui l’ont mise dans une si grande colère. Elle est trop coupable pour qu’on puisse jamais lui pardonner. Elle voudrait confesser sa faute pour qu’on la punisse, s’humilier dans la poussière devant chacun, devant miss Assher elle-même. Sir Christopher la renverrait, ne voudrait plus la voir, s’il savait tout ; et elle serait plus heureuse d’être châtiée que d’être traitée avec tendresse, tandis qu’elle cache ce coupable secret dans son cœur. Mais, tout avouer à sir Christopher, cela ajouterait encore à son affliction. Non, elle ne veut pas avouer : il faudrait faire connaître la conduite d’Anthony. Elle ne peut rester au manoir ; elle doit partir, elle ne pourrait supporter les regards de sir Chris-