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y avoir aucune méprise. Tina est bien assez âgée maintenant pour être une sérieuse petite femme, et, quoique la cure ne soit pas encore prête, cela ne signifie rien. Ma femme et moi n’en serons que plus satisfaits de vous avoir avec nous. Notre petit oiseau chanteur nous manquerait beaucoup, si nous le perdions tout d’un coup. »

M. Gilfil se sentait dans une position très difficile. Il redoutait que sir Christopher ne devinât le véritable état de cœur de Caterina, et cependant il était obligé de s’appuyer sur les sentiments de celle-ci pour refuser.

« Mon cher monsieur, dit-il enfin avec quelque effort, vous ne supposerez pas que je méconnaisse votre bonté, que je ne sois pas reconnaissant de l’intérêt paternel que vous prenez à mon bonheur ; mais je crains que les sentiments de Caterina à mon égard ne soient pas tels, qu’elle veuille m’accorder sa main. Le lui avez-vous jamais demandé ?

— Non, monsieur, nous devinons trop bien ces choses-là pour qu’il soit nécessaire de les demander.

— Bah ! bah ! Le petit singe doit vous aimer. Vous avez été son premier compagnon de jeux, et je me rappelle qu’elle pleurait toujours quand vous vous coupiez légèrement le doigt. De plus, elle a toujours admis que vous étiez son amoureux. Vous savez que je lui ai toujours parlé de vous dans ce sens-là. J’ai cru que vous aviez arrangé la chose entre vous ; Anthony pense qu’elle vous aime ; il a les yeux jeunes et est bien en état de voir clair dans ces matières. Il m’a parlé ce matin et m’a charmé par l’intérêt qu’il m’a montré pour vous et pour Tina. »

Le sang afflua au visage de M. Gilfil ; il serra les