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heureux. Habitué à juger les gens d’après sa forte volonté et en raison de ses projets pour leur avenir, il ne voyait chez miss Assher que des charmes personnels et l’assurance de toutes les qualités domestiques. Le bon goût qu’elle montrait pour les formes extérieures créait entre elle et lui un véritable fond de sympathie. L’enthousiasme de lady Cheverel ne s’élevait jamais au-dessus d’une calme satisfaction, et, douée de la finesse qu’apportent les personnes de son sexe dans l’appréciation les unes des autres, elle avait une opinion plus modérée des qualités de miss Assher. Elle soupçonnait la belle Béatrice d’être impérieuse et tranchante ; étant par principe et par suite d’un empire continu sur elle-même l’épouse la plus soumise, elle remarquait avec désapprobation l’air d’autorité que prenait quelquefois miss Assher à l’égard du capitaine Wybrow. Quand une femme fière a appris à se soumettre, elle emploie toute cette fierté à conserver cette soumission, et elle juge avec sévérité tout essai de domination féminine. Lady Cheverel, cependant, gardait ses impressions pour elle, évitant de troubler la satisfaction de son mari.

Et Caterina ? Comment passa-t-elle ces belles journées d’automne, où le soleil semblait sourire à la joie de la famille ? Elle ne pouvait se rendre compte du changement des manières de miss Assher à son égard. Ces attentions compatissantes, ces sourires de condescendance étaient une torture pour Caterina, toujours tentée de les repousser avec colère.

« Peut-être, pensait-elle, Anthony lui a-t-il dit d’être bonne pour la pauvre Tina. » Quelle insulte ! Il devait bien savoir que la présence même de miss Assher lui était pénible, que ses sourires la tor-