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« Voyons, chère Béatrice, dit-il avec insistance, ne pouvez-vous comprendre qu’il y a des choses dont un homme n’aime pas à parler, des secrets qu’il doit garder par rapport à d’autres que lui-même ? Vous pouvez me demander tout ce qui me concerne ; mais ne me demandez point les secrets des autres. Ne me comprenez-vous pas ?

— Oh oui ! dit miss Assher dédaigneusement, je comprends. Dès que vous faites la cour à une femme, c’est son secret que vous êtes tenu de garder. Il est ridicule de parler ainsi, capitaine Wybrow. Il est très positif qu’il y a plus que de l’amitié entre vous et miss Sarti. Dès que vous ne pouvez vous expliquer, nous n’avons plus rien à nous dire.

— Sur mon honneur, Béatrice, vous me rendrez fou. Est-ce qu’un homme peut empêcher une jeune fille de s’éprendre de lui ? Ces choses-là arrivent constamment ; mais les hommes n’en parlent pas. Ces inclinations se développent sans fondement, surtout quand une femme voit peu de monde ; elles se dissipent quand il n’y a pas d’encouragement. Si vous m’aimiez, vous ne seriez pas surprise que d’autres le puissent.

— Vous voulez dire, alors, que miss Sarti a de l’amour pour vous, sans que vous lui ayez jamais fait la cour ?

— Ne me faites pas dire de telles choses, très chère. Qu’il vous suffise de savoir que je vous aime, que je suis tout à vous. Cruelle reine que vous êtes, vous savez bien qu’il n’y a aucune chance pour une autre là où vous trônez. Vous me tourmentez pour éprouver votre pouvoir sur moi. Mais ne soyez pas trop dure, car vous savez que j’ai, à ce qu’on prétend, une affection au cœur autre que mon