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fiancés, eut soin qu’ils fussent laissés ensemble au salon. Miss Assher, assise sur le sofa, près du feu, s’occupait d’un ouvrage de fantaisie qui paraissait l’intéresser beaucoup. Le capitaine Wybrow était assis en face, tenant une gazette, dont il lisait des extraits avec une aisance étudiée, ne voulant point paraître remarquer le silence dédaigneux de sa fiancée. À la fin il posa le journal ; miss Assher lui dit alors :

« Vous paraissez très intime avec miss Sarti ?

— Avec Tina ? oh oui ! elle a toujours été la favorite de la maison. Nous étions comme frère et sœur.

— Les sœurs en général ne rougissent pas quand leurs frères s’approchent d’elles.

— Est-ce qu’elle rougit ? Je ne l’ai jamais remarqué. C’est une petite personne timide.

— Il serait beaucoup mieux de n’être pas si hypocrite, capitaine Wybrow. Je suis sûre qu’il y a eu quelque coquetterie entre vous. Miss Sarti, dans sa position, ne vous parlerait jamais avec autant de vivacité qu’elle l’a fait hier soir, si vous ne lui aviez pas donné quelque espèce de droit sur vous.

— Ma chère Béatrice, maintenant soyez raisonnable ; quelle possibilité pourrait-il y avoir que j’aie jamais pensé à courtiser la pauvre petite Tina. Y a-t-il rien en elle qui puisse mériter cette espèce d’attention ? Elle est plus une enfant qu’une femme. On pense à elle comme à une petite fille que l’on peut caresser et avec laquelle on peut jouer.

— Je vous prie, à quoi jouiez-vous avec elle hier matin, quand je suis entrée ? Ses joues étaient animées et ses mains tremblantes.

— Hier matin ? Oh ! je me le rappelle. Vous savez que je la tourmente toujours au sujet de Gilfil, qui