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« Eh bien, Tina, comment avez-vous passé votre temps ? »

Le ton aussi bien que les paroles étaient offensants pour elle : le ton si différent de celui d’autrefois ; les mots étaient si insignifiants, si froids. Elle répondit avec un peu d’amertume :

« Je pense que vous n’avez pas besoin de le demander. Cela vous est assez indifférent.

— Est-ce là tout ce que vous avez d’aimable à me dire après ma longue absence ?

Je ne sais pas pourquoi vous vous croyez le droit d’attendre de moi des choses aimables. »

Le capitaine garda le silence. Il désirait éviter les allusions au passé et les commentaires sur le présent. Et cependant il voulait être bien avec Caterina. Il aurait voulu lui témoigner de l’amitié, lui faire des présents, en un mot qu’elle le trouvât très bon pour elle. Mais les femmes sont si déraisonnables. Il n’y a pas moyen de les amener à voir les choses telles qu’elles sont. « Je pensais, dit-il enfin, que vous deviez avoir une bonne opinion de moi, d’avoir fait ce que j’ai fait. J’espérais que vous comprendriez que c’était ce qu’il y avait de mieux pour chacun de nous, ce qu’il y avait de mieux aussi pour votre bonheur.

— Oh ! je vous prie, ne faites pas la cour à miss Assher pour me rendre heureuse », répondit Tina.

En cet instant la porte s’ouvrit, et miss Assher entra pour prendre son ouvrage, qui était sur le clavecin. Elle jeta un coup d’œil rapide sur Caterina, dont le visage était coloré, et, après avoir dit au capitaine, avec un léger ton d’ironie : « Puisque vous avez des frissons, je suis étonnée que vous vous asseyiez près de la fenêtre », elle sortit aussitôt.