Page:Eliot - Scenes de la vie du clerge - Barton Gilfil.pdf/191

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

baronnet avait sacrifié une forte somme et même diminué les ressources au moyen desquelles il comptait mettre à exécution ses projets architecturaux, dans le but d’empêcher l’aliénation de sa propriété et de faire de ce neveu son héritier, poussé à cette démarche, je suis fâché de le dire, par une ancienne querelle avec l’aînée de ses sœurs : car la faculté de pardonner n’était pas une des vertus de sir Christopher. Enfin, à la mort de sa mère, Anthony, qui n’était plus un enfant aux cheveux bouclés, mais un grand jeune homme portant le grade de capitaine, devint le commensal du manoir de Cheverel, pendant ses absences de ce régiment. Caterina était alors une petite personne de seize à dix-sept ans, et je n’ai pas besoin de vous expliquer ce qui arriva naturellement.

On recevait peu de monde au manoir, et le capitaine Wybrow s’y serait fort ennuyé si Caterina n’eût été là. C’était vraiment agréable d’avoir pour elle quelques attentions, de lui parler d’un ton gracieux, de voir son léger frémissement de plaisir, le rouge lui monter au visage, lorsqu’il s’inclinait vers elle par-dessus le piano. C’était amusant aussi de contrecarrer le chapelain aux jambes robustes ! Quel homme oisif peut résister à la tentation de fasciner une femme et d’éclipser un autre homme ? surtout quand il se persuade qu’il n’a aucune mauvaise intention et qu’il laissera plus tard chaque chose reprendre son cours habituel. Au bout de dix-huit mois, cependant, durant lesquels le capitaine Wybrow avait passé une grande partie de son temps au manoir, il trouva que les choses en étaient venues à un point qu’il n’avait nullement prévu. Les doux accents avaient amené les tendres paroles, et celles-ci avaient