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soumission comme un désagrément. Quant à sir Christopher, il était parfaitement indifférent à la critique. Mais, pour moi, qui ai vu le manoir de Cheverel tel qu’il le légua à ses héritiers, j’attribue plutôt ce projet d’embellissement, qu’il avait conçu et poursuivi pendant de longues années, à l’enthousiasme du génie aussi bien qu’à une force de volonté inflexible ; et, en parcourant ces salles aux splendides plafonds si mesquinement meublées, j’ai compris comment avait été employé tout l’argent économisé, avant de s’occuper du confortable, et j’ai senti qu’il y avait en ce vieux baronnet anglais quelque chose de cet esprit supérieur qui distingue l’art du luxe, et qui rend hommage au vrai beau avant de s’occuper de son propre agrément.

À mesure que la laideur du manoir de Cheverel se convertissait en beauté, un changement tout aussi marqué se produisait chez Caterina. L’enfant au teint jaune devenait une jeune fille presque blanche, sans grande beauté, à la vérité, mais dont la grâce un peu aérienne, les grands yeux noirs suppliants et la voix dont les tendres notes basses rappelaient les accents amoureux de la colombe, offraient un charme tout particulier. À l’inverse du bâtiment, toutefois, le développement de Caterina n’était le résultat d’aucuns soins systématiques et attentifs. Elle croissait à peu près comme les perce-neige qu’un jardinier n’est pas fâché de voir dans son enclos, mais qu’il ne prend point la peine de cultiver. Lady Cheverel lui enseigna à lire, à écrire et à réciter son catéchisme ; M. Warren, qui était bon comptable, lui donna des leçons d’arithmétique ; et Mme Sharp l’initia à tous les mystères de l’aiguille.