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d’agréables visions de ménage dans la jolie chaumière de M. Bates, ayant du fruit et des légumes à discrétion et n’ayant plus à répondre à aucun appel de sonnette.

Caterina dissipa bientôt tous les préjugés contre le sang étranger ; quels préjugés pourraient résister à l’innocence et au babil d’un enfant ? Elle fut bientôt la favorite de toute la maison et relégua au second plan le limier favori de sir Christopher, ainsi que les beaux canaris de Mme Bellamy et la plus belle poule de M. Bates. La conséquence en fut que dans l’espace d’une journée elle soumettait chacun à ses caprices, en commençant par Mme Sharp, puis obtenant ses entrées dans le magnifique salon de Sa Seigneurie, où parfois elle goûtait la noble faveur de monter à cheval sur le genou de sir Christopher, qui l’emmenait ensuite faire une visite aux écuries, où Caterina apprit bientôt à entendre sans pleurer l’aboiement des limiers enchaînés et à dire avec un semblant de bravoure, tout en se serrant contre sir Christopher : « Ils font pas mal à Tina ». Puis venait le tour de Mme Bellamy, qui sortait quelquefois pour cueillir les feuilles de rose et de lavande et qui rendait Tina fière et heureuse en lui laissant porter une poignée de ces fleurs dans son tablier, et encore plus heureuse quand on étendait la récolte sur des draps pour la faire sécher et qu’assise au milieu comme une petite grenouille elle recevait une pluie odorante. Un autre de ses plaisirs était de fréquents voyages avec M. Bates dans les jardins potagers et les serres chaudes, où les riches grappes de raisins blancs et rouges pendaient du plafond, hors de la portée de la petite main brune qui se tendait de