Page:Eliot - Scenes de la vie du clerge - Barton Gilfil.pdf/178

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

vigoureux natif du Yorkshire, d’environ quarante ans, dont la nature semble avoir coloré le visage dans un moment de presse, sans avoir le temps de s’occuper des nuances, car tout ce qui paraît au-dessus de sa cravate est uniforme, en sorte qu’à distance on ne distingue pas facilement où sont les lèvres. Vues de près, elles offrent une coupe particulière, et je m’imagine que cela a quelque influence sur le dialecte de M. Bates, dialecte qui, vous le verrez, est plutôt individuel que provincial. M. Bates possède en outre, comme tic, un perpétuel clignotement d’yeux, ce qui, joint à la couleur rougeâtre de son teint et à son habitude de pencher la tête en avant et de la balancer à droite et à gauche en marchant, lui donne l’air d’un Bacchus en tablier bleu que des réformes nouvelles de l’Olympe ont obligé de cultiver lui-même ses vignes. Cependant, de même que les gloutons sont souvent maigres, les hommes sobres sont souvent rubiconds ; et M. Bates est sobre, de cette sobriété mâle, anglaise, qui peut supporter quelques verres de grog sans aucune altération appréciable dans les idées.

« Par mes boutons ! fit M. Bates, que la conclusion du récit de Mme Sharp amena à proférer sa plus forte exclamation, je ne me serais pas attendu à cela de la part de sir Christopher et de milady ; amener dans ce pays un enfant étranger ; je vous garantis qu’il n’en arrivera rien de bon. Dans ma première place — c’était dans une vieille abbaye, entourée du plus grand verger que vous ayez jamais vu — se trouvait un valet français qui volait des bas de soie, des chemises, des bagues, et tout ce qui pouvait lui tomber sous la main, et qui finit par