Page:Eliot - Scenes de la vie du clerge - Barton Gilfil.pdf/177

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Crains Dieu et honore le roi ». La société est rangée en demi-cercle autour d’une table bien garnie près du brillant foyer. Le reste de la pièce est plongé dans une demi-obscurité où l’imagination peut s’exercer librement. À l’extrémité de la pièce est une imposante table de chêne posée sur quatre pieds massifs. Plus loin, le long du mur, de vastes dressoirs renferment d’inépuisables compotes d’abricots et d’abondantes provisions pour le sommelier. Un ou deux tableaux égarés sont arrivés jusque-là et font l’effet de taches d’un brun foncé sur les murs couleur chamois. Au-dessus d’une porte à double battant on voyait une peinture dans laquelle, grâce à quelques indices de visage aperçus dans l’ombre, on pouvait reconnaître une Madeleine. Beaucoup plus bas était suspendu un autre tableau sur lequel on distinguait une apparence de chapeau à plumes, avec quelques fragments de fraise, que Mme Bellamy affirmait représenter sir Francis Bacon, l’inventeur de la poudre à canon, suivant elle, et qui dans son opinion aurait pu mieux faire.

Mais, ce soir-là, l’esprit s’arrête peu sur le grand savant et trouve qu’un philosophe mort est bien moins intéressait que le jardinier vivant, qui est assis dans le demi-cercle autour du feu. M. Bates est le soir un des hôtes habituels de la femme de charge et préfère les plaisirs sociables qu’il y trouve, la conversation et le grog, à sa vie de célibataire dans sa chaumière, bâtie sur une petite île où l’on n’entend que le croassement des corneilles ou les cris de l’oie sauvage, sons poétiques peut-être, mais peu réjouissants.

M. Bates n’est point un être insignifiant. C’est un