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entre ce teint jaune et la blancheur de sa robe de mousseline. Ses grands yeux paraissent d’autant plus remarquables, que ses cheveux noirs sont rejetés en arrière et réunis sous un petit bonnet retenu sur sa tête par un nœud de ruban cerise.

La dame, plus âgée, offre un type bien différent. Elle est grande et le paraît encore davantage, à cause de sa haute coiffure poudrée et mêlée de dentelles et de rubans. Elle approche de la cinquantaine ; mais son teint est encore d’une admirable fraîcheur. De très beaux cheveux blonds, une lèvre fière et épaisse, et la tête un peu rejetée en arrière lorsqu’elle marche, lui donnent une expression de hauteur que ne contredisent point ses yeux gris et froids. Le fichu ajusté sur le corsage de sa robe bleue accuse l’ampleur majestueuse de son buste, et, à la voir fouler le gazon de ce pas royal, on s’imaginerait quelqu’une des imposantes dames peintes par Reynolds soudainement sortie de son cadre pour jouir de la fraîcheur du soir.

« Mettez les coussins plus bas, Caterina, que nous ayons moins de soleil », cria-t-elle d’un ton d’autorité. La jeune fille obéit ; les deux dames s’assirent, et leur toilette blanche et bleue, s’enlevant sur le fond vert des lauriers, formait une gaie harmonie, bien que le cœur de l’une d’elles fût indifférent, et celui de l’autre un peu triste.

Le manoir de Cheverel aurait fait un charmant tableau ce soir-là, si quelque Watteau anglais s’était trouvé là pour le peindre. Cette maison seigneuriale, en pierre grise, recevant les capricieux rayons du soleil qui met des touches de lumière dorée aux vitraux des ogives et au grand hêtre qui s’incline