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le vicaire s’avancer directement vers lui, au moment intéressant où elle commençait à ronfler d’une manière sonore ; il cria de toute la force de ses poumons : « Arrêtez ! ne renversez pas ma toupie ! » Depuis ce jour, le petit garçon devint le favori de M. Gilfil, qui s’amusait à provoquer son étonnement par des questions qui donnaient à Tommy l’opinion la plus médiocre de l’intelligence du Révérend.

« Eh bien, petit Pantalon, est-ce qu’on a trait les oies aujourd’hui ?

— Trait les oies ? mais on ne trait pas les oies : quelle bêtise !

— Vraiment ! comment vivent les oisons alors ? »

La nourriture des oisons dépassant les connaissances de Tommy en histoire naturelle, il feignit de prendre cette question comme une exclamation et non comme une interrogation, et s’absorba dans l’enroulement de sa toupie.

« Je vois que vous ne savez pas comment vivent les oisons ! Mais avez-vous remarqué qu’il pleuvait des dragées hier ? (Ici Tommy devint attentif.) Eh bien, il en est tombé dans ma poche pendant ma promenade à cheval. Regardez dans ma poche s’il y en a encore. »

Tommy, sans chercher à comprendre cette sorte de grêle, ne perdit point de temps pour s’assurer de la présence des grêlons, car il avait une foi bien arrêtée sur les avantages qu’il y avait à plonger la main dans la poche du pasteur. M. Gilfil l’appelait sa poche miraculeuse et prenait grand plaisir à dire aux « petites barbes » et aux « petites paires de souliers » — c’est ainsi qu’il appelait tous les petits garçons et les petites filles — que, toutes les fois qu’il y mettait des