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trouva mystérieusement ternie. Mais la voiture s’arrêta à la grille de l’hôpital. Bientôt après, elle se promenait avec Lydgate autour des pelouses du jardin, et ses sentiments revenaient avec énergie au sujet qui lui avait fait chercher cette entrevue.

Will Ladislaw, cependant, était mortifié, et il en savait assez clairement la raison. Les chances de rencontrer Dorothée étaient rares et ici, pour la première fois, il venait de s’en présenter une, dans laquelle il n’avait pas paru à son avantage. Ce n’était pas seulement, comme ç’avait été déjà le cas, le sentiment qu’elle n’était pas exclusivement occupée de lui, mais surtout le sentiment qu’elle l’avait surpris dans des circonstance, où il n’était pas, lui, exclusivement occupé d’elle. Au milieu des cercles de Middlemarch qui ne faisaient pas partie de la vie de Dorothée, il se sentait rejeté à une nouvelle et plus grande distance d’elle. Mais ce n’était pas sa faute : depuis qu’il avait pris un appartement en ville, il avait dû faire, sans aucun doute, de nombreuses connaissances ; sa position exigeait qu’il connût tout le monde et toute chose. Personne certainement, aux environs, ne méritait plus d’être connu que Lydgate, et il se trouvait qu’il avait une femme musicienne et bien digne aussi d’être recherchée.

Telle était toute l’histoire de cette situation au milieu de laquelle Diane était descendue d’une façon trop inattendue devant son adorateur. Il y avait là quelque chose de mortifiant. Will sentait bien, au fond, que sans Dorothée il ne se serait pas établi à Middlemarch : et voilà maintenant que son établissement dans cette ville menaçait de le séparer d’elle par ces barrières de l’opinion, plus fatales à la persistance d’un mutuel intérêt que la distance entre Rome et l’Angleterre. Il était facile de défier les préjugés sur le rang et les professions, quand ils se présentaient sous la forme d’une lettre tyrannique de M. Casaubon ; mais les préjugés,