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SCÈNES DE LA VIE DU CLERGÉ

veau bu, n’est-ce pas ? Je vous battrai pour rappeler votre raison. »

Il mit la main sur son épaule, la fit retourner et la poussa lentement devant lui dans le corridor et dans la salle à manger, qui était ouverte.

Il y avait là, sur le manteau de la cheminée, un portrait de la mère de Jeanne, vieille femme aux cheveux blancs et aux yeux noirs, en bonnet soigneusement plissé. Certainement, les yeux de la vieille mère prennent une expression d’angoisse en voyant Jeanne — qui ne tremble pas, non ! il vaudrait mieux qu’elle tremblât — debout et sans émotion, dans sa beauté, tandis que le bras pesant se lève pour la frapper. Le coup retombe — un autre — puis un autre. Certainement la mère entend ce cri : « Ô Robert ! grâce ! grâce ! »

Pauvre vieille femme ! Est-ce pour cela que vous avez souffert ces douleurs de la maternité, dans votre triste veuvage, il y a trente-cinq ans ? Est-ce pour cela que vous conservez ce petit soulier de maroquin, le premier que Jeanne ait usé et que vous baisiez chaque jour pendant que votre fille était en pension ? Est-ce pour cela que vous l’avez regardée avec orgueil quand elle est revenue auprès de vous blanche, dans sa riche beauté, comme un grand lis qui vient de s’ouvrir au soleil ?

La mère, couchée sans sommeil, prie dans sa maison isolée et pleure les dures larmes de la