Page:Eliot - La Conversion de Jeanne.djvu/305

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
301
LA CONVERSION DE JEANNE

mué au profond de son cœur, l’angoisse et la joie.

C’était une matinée orageuse, et il avait plu lorsqu’ils quittèrent Holly Mount ; mais, comme ils avançaient, le soleil perça les nuages, qui roulèrent en grandes masses quand ils entrèrent au cimetière et qu’ils entendirent M. Walsh dire : « Je suis la résurrection et la vie ». Les visages ne furent pas indifférents à cette cérémonie ; le service funèbre ne fut point une simple forme. Chaque cœur était rempli du souvenir d’un homme qui, pendant une vie de sacrifice et pendant une pénible agonie, avait été soutenu par la foi vivante qui remplissait son âme.

Lorsque Jeanne quitta le cimetière, elle ne retourna pas à Holly Mount ; elle se rendit à sa maison de la rue du Verger, où sa mère l’attendait. Elle lui dit avec calme : « Faisons le tour du jardin, ma mère ». Et elles en firent le tour en silence, leurs mains entrelacées, regardant les crocus dorés brillant des rayons printaniers. Jeanne sentait en elle un calme profond. Elle ne désirait rien, n’ambitionnait rien. Elle vit les années à venir s’étendre devant elle comme un après-midi d’automne. La vie ne pouvait plus avoir aucune agitation pour elle ; c’était un service de reconnaissance et d’efforts patients. Elle marchait en présence d’un témoin invisible, de l’amour divin qui l’avait sauvée de l’amour humain, qui avait attendu l’éternel repos, jusqu’à ce qu’il eût vu le sien à elle assuré jusqu’à la fin.