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SCÈNES DE LA VIE DU CLERGÉ

raconta comment elle en était venue à envoyer chercher M. Tryan, comment elle s’était rappelé leur rencontre chez Sally Martin en automne, et avait ressenti un désir irrésistible de le voir et de lui raconter ses fautes et ses chagrins.

« Je vois maintenant, ma mère, la bonté de Dieu, qui a voulu que nous nous rencontrassions ainsi pour vaincre mes préjugés contre le pasteur et me faire souvenir de lui au milieu de mes malheurs. Vous savez les choses ridicules que je disais de lui, dont je ne savais pourtant rien. Et cependant c’était l’homme qui devait me consoler et me secourir quand tout le reste me manquerait. C’est étonnant, mais je me suis sentie capable de lui parler comme je ne l’avais fait à personne auparavant, et chaque mot qu’il m’a dit entre dans mon cœur et a pour moi une nouvelle signification. Je crois que cela vient de ce qu’il a senti la vie plus profondément que d’autres, et qu’il a une foi plus grande. Ses paroles me viennent comme la pluie à la terre desséchée. Il m’avait toujours semblé, auparavant, que je pouvais voir derrière les paroles des gens comme derrière un écran ; mais chez M. Tryan, c’est l’âme même qui parle.

— Bien, ma chère enfant, je l’aime et je le bénis de ce qu’il vous a soulagée. Je n’ai jamais cru le mal qu’on disait de lui, quoique je ne me souciasse point d’aller l’entendre, car je me con-