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LA CONVERSION DE JEANNE

CHAPITRE XV

Jeanne resta tranquille, comme elle l’avait promis ; mais le thé, qui l’avait réchauffée et lui avait donné la sensation d’un soulagement physique, n’avait fait qu’augmenter l’agitation de son cerveau. Ses idées avaient une nouvelle lucidité, qui lui faisait éprouver comme si elle n’avait vu la vie auparavant qu’à travers une vapeur épaisse ; ses pensées, au lieu de découler du travail de son propre esprit, lui apparaissaient telles que des existences extérieures qui s’imposaient à elle comme des visions. L’avenir prenait une succession de formes de malheur, finissant toujours par la ramener de nouveau à son ancienne vie de terreur, de stupeur et de désespoir. Son mari avait si longtemps chargé d’ombre sa vie, que son imagination ne pouvait s’attacher à une condition d’où cette grande frayeur fût absente ; et même son absence — qu’était-ce ? sinon une pause, où il n’y avait rien qu’elle pût souhaiter.