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demeurer si longtemps à ce stupide bal, lui avait proposé de rentrer dans leur appartement ; mais elle avait résisté en invoquant la politesse, non sans frayeur de la possibilité qu’il fût silencieusement en colère contre elle. Elle avait son motif pour demeurer, quoiqu’elle commençât à désespérer de pouvoir faire remarquer à celui que cela intéressait, le vieux collier qu’elle avait roulé autour de son poignet. Enfin Deronda était venu !

— Je ne danserai plus. N’êtes-vous pas content ? lui dit-elle avec un peu de gaieté. Vous vous seriez cru obligé de vous offrir comme cavalier, et je suis certaine que vous avez plus dansé que vous ne deviez.

— Je ne le nierai pas, si vous avez dansé autant que vous le vouliez, répondit Deronda.

— Voulez-vous être assez bon pour me chercher un verre d’eau ?

Il n’avait pour cela que quelques pas à faire. Gwendolen était drapée dans un burnous de laine blanche, fine et légère, sous lequel ses mains blanches étaient cachées. Pendant qu’il s’éloignait, elle ôta son gant, et quand elle avança le bras pour prendre le verre qu’il lui tendait, le bracelet-collier, avec son triple rang de turquoises maladroitement contourné sur son poignet, vint nécessairement en évidence. Grandcourt le vit et remarqua aussi qu’il attirait l’attention de Deronda.

— Qu’est-ce donc, demanda-t-il, que cette chose hideuse que vous avez autour du poignet ?

— Ceci, répondit-elle tranquillement en désignant les turquoises pendant qu’elle tenait encore le verre, c’est un vieux collier que j’aime à porter. Je l’avais perdu un jour ; quelqu’un me l’a retrouvé et rendu.

En disant ces mots, elle remit le verre à Deronda qui l’emporta, et qui, en revenant, lui dit, afin d’empêcher toute nouvelle allusion au collier :