Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et d’entendre Deronda, quand sa visite ne devait plus durer que deux jours. Elle se rajusta toute seule, reprit son petit air d’assurance, et, une fois descendue, voulut paraître en bonnes dispositions.

La réunion ne comprenait que des dames. Lady Pentreath les amusait en leur décrivant les salons sous la régence, en imitant les figures des dames et des messieurs en 1819 — l’année où elle fut présentée ! — quand Deronda parut.

— Veut-on m’accepter ? dit-il. Peut-être ferais-je mieux d’aller rejoindre ces messieurs, que je suppose au billard ?

— Non, non, restez ! dit lady Pentreath. Ces dames allaient avoir assez de moi ; faites-nous savoir ce que vous avez à dire.

— C’est un appel assez embarrassant, dit-il en s’asseyant à côté de lady Mallinger et en s’adressant à elle ; je crois que je ferai bien de saisir cette occasion pour parler de notre chanteuse, à moins que vous ne l’ayez déjà fait !

— Ah oui ! la petite juive ! répondit lady Mallinger. Non, je n’en ai pas parlé encore. Il ne m’est pas entré dans l’esprit que quelqu’un pût avoir besoin de leçons de chant.

— Toutes ces dames en connaissent d’autres qui ont besoin de leçons de chant, répliqua Deronda. J’ai, par hasard, découvert une chanteuse exquise, fit-il en se tournant vers lady Pentreath. Elle demeure chez des dames de mes amies, la mère et les sœurs de mon copain à Cambridge. Elle a été au théâtre de Vienne ; mais elle veut quitter la carrière dramatique et se suffire en enseignant.

— Cette espèce-là fourmille, dit la vieille dame. Fait-elle payer ses leçons très cher ou très bon marché ? Ce sont les deux seules amorces que je connaisse.

— Il y en a une troisième pour ceux qui l’entendent, reprit Daniel. Son chant, à mon avis, est quelque chose d’exceptionnel. Elle a été admirablement montrée et, de plus