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LIII


Quand Deronda rencontra Gwendolen et Grandcourt sur l’escalier de l’Italia, il était dans une préoccupation extrême. Il se rendait au second appel de sa mère. Deux heures après qu’il l’eut quittée, il apprit que la princesse de Halm-Eberstein était partie de l’hôtel, et, comme le but de son voyage à Gênes était atteint, il aurait pu prendre aussitôt le train pour Mayence, où il devait remettre la lettre de Joseph Kalonymos et se faire restituer le coffre de famille. Mais un mélange d’irrésolutions dont il n’aurait pu donner de raisons définies, retarda son départ. Depuis longtemps déjà il avait pris congé de sa mère, et il demeurait encore accablé sous le poids d’un sentiment rétrospectif. Se voyant seul dans sa chambre, il crut pouvoir se permettre de verser des larmes de pitié sur cette femme qui lui tenait de si près et qui cependant était si loin de lui. Il se sentit en relation directe avec ce grand-père qui avait été animé d’impulsions si énergiques et de pensées qu’il voyait, pour ainsi dire, se réveiller en lui-même, et, au milieu de ses méditations passionnées, Mordecai et Mirah étaient toujours présents, comme deux