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corrigée de leurs effets dans le purgatoire, est arrivée au pinacle de la confusion, dont les mailles fatales l’enveloppent plus étroitement encore intérieurement qu’extérieurement.

En emmenant sa femme avec lui dans son excursion nautique, Grandcourt n’avait nullement l’intention de se débarrasser d’elle. Au contraire : il voulait lui faire sentir avec plus de certitude qu’elle était à lui et qu’elle devait agir selon la volonté de son mari. En outre, il aimait beaucoup naviguer. Son absolutisme rêveur et oisif, que les exigences sociales ne pouvaient plus contrarier, trouvait son compte à cette disposition, et il ne la considérait aucunement comme un équivalent de la tristesse de la Maremme. Il avait eu ses raisons pour se faire accompagner par sa femme ; il soupçonnait en son esprit un accroissement d’opposition, et ce qu’il éprouvait au sujet de l’inclination sentimentale qu’elle avait manifestée pour Deronda était ce que, chez un autre homme, il aurait appelé de la jalousie. De sa part, cela n’avait l’air que d’une simple résolution à mettre fin à la folie qui aurait sans doute suivi la visite de Deronda, qu’il avait devinée et par suite interrompue.

Grandcourt pouvait se prétendre pleinement justifié en exigeant que sa femme remplît les obligations qu’elle avait acceptées. Son mariage était un contrat par lequel tous les avantages ostensibles étaient du côté féminin, il savait parfaitement qu’elle ne l’avait pas épousé, qu’elle n’avait pas surmonté son horreur pour certains faits, par amour pour sa personne ; il l’avait obtenue grâce au prestige du rang et du luxe qu’il pouvait lui donner et qu’en effet il lui avait départis. Il avait donc rempli, quant à lui, toutes les obligations du contrat.

Gwendolen, nous le savons, était au fait de la situation. Elle ne pouvait s’excuser en disant que, de son côté, il y avait eu dans le contrat une clause tacite ; à savoir, qu’elle entendait gouverner et faire ce qu’elle voudrait. Malgré ses