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XLIX


Quand Deronda se présenta chez sa mère, il sentit revivre en lui les agitations prématurées de son jeune âge. Les deux domestiques qui se tenaient dans l’antichambre le regardèrent ébahis, s’étonnant que le docteur que leur maîtresse venait consulter fût ce beau jeune homme en toilette de soirée. Mais Daniel n’eut le temps de rien remarquer, car une seconde porte s’ouvrant aussitôt, il se trouva en présence d’une personne, assise au fond d’un immense salon, qui se leva et attendit son approche.

À l’exception du visage et d’une partie des bras, elle était littéralement couverte de dentelles noires ; elles tombaient négligemment du haut de sa tête aux cheveux grisonnants, le long de sa figure amaigrie ; ses bras, nus jusqu’au coude et chargés de riches bracelets, étaient croisés devant elle, et l’admirable équilibre de sa tête la faisait paraître plus belle qu’elle ne l’était réellement. Deronda ne put l’observer que quand il fut en face d’elle ; alors il prit la main qu’elle lui tendait et la porta à ses lèvres. Elle la laissa dans la sienne, et l’examina attentivement. Il n’osait pas faire un mouve-