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son frère, l’étreignit de ses petites mains et l’embrassa avec une enfantine précipitation. Son chapeau tomba et découvrit ses beaux cheveux.

— Ah ! le cher visage, le cher visage ! murmura Mordecai avec amour, en posant délicatement ses mains amaigries sur la tête de sa sœur.

— Tu es bien malade, Ezra, dit tristement Mirah.

— Oui, chère enfant, et corporellement je n’ai plus longtemps à être avec toi, répondit-il avec calme.

— Oh ! je t’aimerai et nous parlerons d’elle, dit Mirah d’une voix aussi douce qu’un chant d’oiseau. Je te dirai tout et tu m’apprendras à être une bonne juive,… ce qu’elle aurait aimé que je fusse… Je serai toujours avec toi quand je n’aurai pas à travailler ; car je travaille maintenant. Je gagnerai de l’argent pour notre subsistance ! Oh ! j’ai eu de si bons amis !

Elle avait complètement oublié que des étrangers étaient là ; elle s’en souvint alors et se retourna de la manière la plus gracieuse, en laissant une main sur le bras de son frère, pendant qu’elle regardait madame Meyrick et Deronda. L’heureuse émotion que ressentit la petite mère en assistant à cette rencontre, l’avait déjà gagnée à Mordecai, qui lui sembla avoir, en réalité, plus de dignité et plus de raffinement que le récit de Deronda n’avait pu le lui faire supposer.

— Vois cette chère dame, dit Mirah. J’étais une étrangère, une pauvre vagabonde, elle a cru en moi : elle m’a traitée comme sa fille… Je vous en prie, donnez votre main à mon frère, ajouta-t-elle d’un ton suppliant en prenant la main de madame Meyrick qu’elle mit dans celle de Mordecai, puis les pressant toutes deux dans les siennes, elle les porta à ses lèvres.

— L’éternelle bonté a été avec vous, dit Mordecai. Vous avez aidé à exaucer la prière de notre mère.