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— Je ne tiens pas à ce qu’elle le soit, dit Gwendolen en faisant avec la tête un petit mouvement mutin et en souriant. La discussion finit là.

Quand M. et madame Gascoigne et leur fille arrivèrent, Gwendolen, loin de se montrer dédaigneuse, fut aussi amicale que possible avec eux. Elle se présentait à des parents qui ne l’avaient pas vue depuis l’âge de seize ans et elle tenait à se faire admirer par eux.

Madame Gascoigne ressemblait à sa sœur, quoique plus brune et plus élancée ; ses traits n’avaient pas été flétris par le chagrin ; ses mouvements étaient moins languissants, son expression plus vive peut-être qu’il n’aurait convenu à la femme d’un recteur. Ces dames se ressemblaient par une disposition à la condescendance, qui allait jusqu’à l’obéissance ; mais cette disposition, grâce aux circonstances différentes dans lesquelles vécurent les deux sœurs, les conduisit à des résultats opposés. La plus jeune, madame Davilow, avait été irréfléchie ou tout au moins malheureuse dans ses deux mariages ; l’aînée se croyait la plus enviable des femmes, et la souplesse de son caractère lui avait fait adopter parfois des formes de langage d’une définition assez surprenante. Ses opinions sur le gouvernement de l’Église étaient trop décidées pour qu’elles ne lui eussent pas été inspirées par l’influence de son mari. M. Gascoigne avait des vertus agréables, certains avantages incontestables, et les défauts qu’on lui imputait étaient de ceux qui assurent le succès.

Ce qui constituait un des principaux de ces avantages, c’est qu’il était bien de sa personne et qu’il faisait peut-être une impression meilleure à cinquante-sept ans que dans ses plus jeunes années. Il n’avait rien de clérical, pas de manières raides ni d’aisance affectée ; on l’aurait pris pour un gentleman aux traits réguliers et bien marqués, aux cheveux gris de fer et au nez qui, commençant avec