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— Vous ne l’aurez pas. Je le renverrai.

— Vous ne l’aimez pas beaucoup non plus ?

— Pas le moins du monde. Je l’ai laissé s’accrocher à moi parce qu’il a toujours été un pauvre diable, dit Grandcourt avec une indifférence absolue. On me l’a donné pour compagnon de voyage quand j’étais jeune homme. Il a toujours été une brute ; le croisement d’une truie et d’un dilettante.

Gwendolen rit aux éclats. Tout cela lui paraissait bon et assez naturel. Le dédain de Grandcourt rehaussait sa bonté, et, quand ils atteignirent la porte, sa manière de la lui ouvrir fut la perfection de l’hommage facile.

Réellement, pensa-t-elle, il sera le moins désagréable des maris.

Madame Davilow se mourait d’impatience et d’inquiétude en attendant sa fille dans sa chambre à coucher. Quand Gwendolen y entra, elle courut à sa mère, l’embrassa presque convulsivement et lui dit à voix basse :

— Descendez, maman, et venez voir M. Grandcourt. Je me suis engagée à lui.

— Chère enfant ! s’écria madame Davilow avec une surprise plus solennelle qu’heureuse.

— Oui, reprit Gwendolen, du même ton et avec une vivacité qui démontrait l’inutilité de nouvelles questions, tout est convenu. Vous n’irez pas à Sawyer’s Cottage, et je ne subirai pas l’examen de madame Mompert. Tout sera comme je l’aime. Maintenant, descendez avec moi.