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que prendront les événements, si ce mariage devient probable ou s’il arrive autre chose qui rende ses besoins d’argent plus pressants. Ce que je propose vaudrait mieux pour lui que d’hypothéquer Ryelands.

— C’est vrai, répondit Lush, mais il ne faut pas le presser ; il n’est pas homme à se laisser conduire même par son intérêt, particulièrement s’il se doutait que le vôtre pût y gagner aussi. Je lui suis attaché, et cela se conçoit ; voici quinze ans que je ne l’ai pas quitté. Il me remplacerait difficilement. Il a un caractère tout particulier : c’est M. Henleigh Grandcourt. Cependant je lui suis dévoué, car j’ai été comme un tuteur pour lui depuis sa vingtième année. C’était alors un gaillard bien séduisant ; il pourrait l’être encore s’il le voulait. Je vous le répète, sir Hugo, je lui suis attaché, et je crois que, si je lui manquais, il pourrait bien le regretter.

Cependant, l’espérance caressée par Lush d’un retard indéfini, fut brisée le lendemain matin par Grandcourt qui l’accueillit par cette question :

— Avez-vous tout préparé pour notre départ par le train de Paris ?

— J’ignorais que vous eussiez l’intention de partir, répondit Lush qui n’en était nullement surpris.

— Vous auriez dû le savoir, reprit Grandcourt en regardant brûler son cigare, et de cette voix de basse qui lui était habituelle quand il voulait exprimer son dégoût ou sa décision. — Voiliez à ce que tout soit prêt et qu’aucune brute ne monte dans le même compartiment que nous. Ah ! laissez aussi mon P. P. C. chez les Mallinger.

En conséquence, le lendemain ils étaient à Paris, où Lush reçut l’ordre de partir pour Diplow et d’y mettre tout en ordre, en attendant l’arrivée de Grandcourt ; et ce ne fut que plusieurs jours après qu’il reçut un télégramme lui disant d’envoyer la voiture à la station de Wancester.