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sont à leur poste, pendus aux drisses, la tête nue, immobile dans le vent. Une impatience fébrile exaspère les plus modérés. Les secousses des barques se répercutent dans leur thorax où le cœur saute. Des ordres, des jurons brefs partent comme des balles. On voit le caraco rouge de la Gaude flamber sur le Secours de ma vie et la stature de Perchais dominer pesamment l’arrière de son bateau. Les regards mangent la terre, dans l’attente du signal, et sur toute la chaîne des sloops, un grand souffle de force brute gonfle à éclater les poitrines et les coques.

Un coup de canon !

— Ho hisse ! Ho hisse !… Hardi p’tit gars ! Ho hisse !…

Par grandes pesées, les lourdes voilures s’enlèvent, flasques, loqueteuses, puis éployées brusquement, arrachent les barques du mouillage. Les palans forcés geignent de douleur. Les hommes, accrochés par grappes, étarquent à coups de reins. Et les voiles se tendent, s’aplatissent, crispant leurs empointures, tandis que les hommes se ruent sans cesse à grands cris.

— Hardi garçon !… Ho hisse ! Ho hisse !…

Le Bon Pasteur tombe sur l’Aimable Clara et les deux Aquenette s’insultent sauvagement, bord à bord. Il n’y a plus de frères, mais des ennemis qui gesticulent comme des singes fous. Soudain le foc