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Il frappait alternativement la table et sa poitrine à grands coups de poing. Mais sans s’inquiéter, Bernard chassa son fils devant lui, tandis que la mère Zacharie, accourue au tumulte, criait d’un ton aigre :

— Enfin il a ben l’ droit ! c’est son gars après tout ! Et vous aut’es, tas d’saligauds, vous cassez ma vaisselle !…

La remontrance se fit à la maison, en présence de la mère, qui lâcha d’émotion le chou qu’elle nettoyait pour la soupe, en entendant son patron traiter le gars d’ivrogne et de débauché.

— Allons, concilia-t-elle, il ne le fera plus, une fois n’est pas coutume…

— Ah ! pas d’excuses ! coupa sèchement Bernard, pour un gaillard qui traîne du matin au soir en compagnie de Tonnerre et du grand Perchais ! Ça va finir, et pas plus tard que demain ! Je te le mets en apprentissage !

Pour la première fois, P’tit Pierre releva son front têtu et affirma résolument :

— J’ m’en irai avec Ugène quand il s’ra revenu !

— Laisse donc Ugène tranquille ! t’iras en apprentissage !

— J’ m’en irai avec Ugène, sur son bateau !

— Ugène ! Ugène ! tu sais seulement pas quand tu le verras !

— Tu vas nous porter malheur, mon Bernard, fit doucement la bonne femme.