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Myrtes et Cyprès.

À deux pas de ses tours bêche le paysan.
Le manant d’autrefois, le maître d’à présent,
Homme simple toujours, penseur plutôt qu’artiste,
Trouve que ce géant assez longtemps existe,
Que les pierres couvrant un terrain généreux
Ne servent, après tout, à rien d’avantageux,
Et qu’il vaudrait bien mieux, déblayant ces décombres,
Hâter l’effet des ans sur ces murailles sombres.
Cela peut être fait sinon ce jour, demain…
Ô poëte, et l’été, si tu prends ce chemin
Pour y porter ton rêve et ta mélancolie,
Tu comprendras pourquoi tout passe et tout s’oublie
En voyant à l’endroit où, l’an dernier, tes yeux
Contemplaient ce manoir triste et mystérieux,
Frissonner les blés mûrs et fumer les chaumières
Construites sur le sol avec les pauvres pierres
Du castel féodal mort sans faire de bruit :
Le temps le respectait, l’homme l’aura détruit.


4 août 1873.