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Myrtes et Cyprès.

Le soleil caressant, le sublime enchanteur.
Cet endroit est si laid que le jour en a peur.
Lupanar pour la femme, et pour l’homme caverne,
Tout ce qu’on y rencontre est noir, livide ou terne.
Les pignons des maisons s’élevant dans les airs,
Moisis et vermoulus, font songer aux enfers.
La nuit, on voit paraître aux lucarnes sinistres
Des têtes de voleurs, des profils de cuistres,
Le forçat évadé, l’oblique vagabond
Ayant le sang aux mains et la souillure au front.
Ils fêtent leur sabbat aux lueurs des feux rouges.
Les filles au teint glabre, étoiles de ces bouges,
Se pâment en désirs dans les bras du bandit,
Et la viole pleure et le fifre gémit.
Un alguazil m’a dit que pour leurs castagnettes
Ces mégères ont pris leur rotule aux squelettes,
Tant le bruit semble sourd, lugubre et croassant.
Ce qui se passe là, je serais impuissant
À le rendre. Le soir, au milieu de l’orgie,
La nappe autant de vin que de sang est rougie.