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LES FUSILLÉS DE MALINES

basse, ne rient plus, s’apitoient sur elles et sur eux ; elles ont peur, et moins que jamais elles ne songent à se dérober au trop doux voisinage. Encore une fois, le mystère du lendemain exaspère la jouissance présente. Le crépuscule tombe navrant et fatidique. À présent, sous les arbres, il fait à peu près la même lumière que dans l’église, ce matin… Les sauvages instruments se taisent. À quoi bon ce tapage ! On ne danse qu’à peine. Les couples s’écartent peu à peu. Le vide se fait autour du tilleul…

Comme le jour déclinait, que la musique du bal tremblotait avant de s’éteindre ainsi qu’un luminaire épuisé, Tistiet l’Oiseleur regagnait, à larges enjambées, les premières maisons de Bonheyden rendu à une apparente accalmie.

Une ombre adossée au mur lui dit doucement : « Bonsoir Tistiet ! »

Il reconnut Linotte, la petite vachère de baes Tuytgen, une sauvageonne de son âge qu’il « voyait volontiers », tout en la taquinant beaucoup. Un jour il lui offrait un oiselet, le lendemain il pourchassait ses vaches ou lui fourrait des orties dans le cou.