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LES FUSILLÉS DE MALINES

se précipitant entre les vannes qui s’entr’ouvrent, la foule déferle dans les bâtiments conventuels, ratisse, bouleverse, fracture le mobilier, se livre à un nouveau carnage de paperasses, mais n’agrippe et ne râfle qu’une dérisoire quantité de numéraire ou même de ces assignats tant déprécies, connus du peuple sous le nom de « pampiére d’argent ».

Aussitôt que les bourgeois apprennent le pillage de la recette, leur cupidité l’emportant sur leur couardise, ils jugent l’occasion excellente de rentrer dans la possession des sommes versées. Mais les paysans n’ont pas attendu leur arrivée pour nettoyer la caisse, et ils s’en reviennent de la recette, en affectant de s’être rempli les goussets, ou jonglent ostensiblement avec les florins et les jaunets. Les contribuables entourent les picoreurs et réclament une part, au moins, du butin. C’est, en somme, leur argent, leur bel argent dont les ruraux s’accaparent ; du moment que les exacteurs révolutionnaires l’ont perdu, il faut qu’il retourne à ses anciens détenteurs. Avec des criailleries, des tremblantes mains d’usu-