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XXII

On ne peut qu'évaluer à peu près les pertes des Turcs, elles furent immenses. La mer était, à plusieurs milles de distance, couverte de débris, de navires désemparés, d'embarcations chargées de blessés et de mourants, de cadavres et de bâtiments en feu. Plus loin, un vaste incendie dévorait les restes de la flotte tunisienne et les navires de transport échoués au fond de la baie; et l'on voyait à terre les soldats turcs, effrayés, qui gravissaient les montagnes pour chercher un refuge dans l'intérieur de la Morée. De soixante-dix-huit vaisseaux de guerre, dont la construction et l'équipement avaient coûté de prodigieux efforts et des sommes énormes, il restait à peine quelques navires dispersés, des débris et des morts.

Le lendemain du combat, Taher-Pacha se rendit à bord de l'amiral anglais et lui exprima ses regrets de tant de désastres, en le suppliant d'y mettre terme.

Outre la supériorité de leur artillerie, les Turcs avaient celle de la position et du nombre; en effet, ils comptaient environ dix-neuf mille six cents hommes d'équipage ou de garnison, tandis que l'effectif des équipages des flottes combinées ne s'élevait qu'à huit mille huit cent cinquante hommes. Habiles artilleurs, les Turcs avaient particulièrement dirigé leur pointage dans la mâture des vaisseaux alliés, et ils avaient en effet causé de grands ravages dans le gréement. Leur but était d'empêcher les flottes de sortir des parages dangereux de Navarin, et ils eussent réussi avec un peu plus d'union et d'expérience des manœuvres.