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longtemps après qu'il a cessé de mettre les Turcs en déroute, ceux-ci, possesseurs de toute la Grèce, vainqueurs de l'Europe, respectent la petite ville de Croïa, protégée par l'ombre de Scanderberg. On raconte que les Ottomans, plusieurs années durant, vinrent en pèlerinage vers le tombeau de Scanderbeg, afin d'aiguiser leurs sabres sur la pierre qui recouvrait les restes du héros.

X

Les Vénitiens seuls disputèrent aux Turcs la possession de ce pays dévasté par tant de guerres, et condamné fatalement à une longue stérilité, à une désolation séculaire. Tour à tour victorieuse et vaincue, la république vénitienne fit flotter le pavillon de Saint-Marc sur toutes les mers de la Grèce, et l'arbora fièrement dans les îles Ioniennes, dans quelques-unes des Cyclades, à Candie, capitale de la Crète, à Négrepont, dans l'Eubée. Mais la terre ferme demeura au pouvoir de ceux qui devaient être ses derniers possesseurs, et il faut bien reconnaître que l'insouciance des pachas musulmans fut peu propre à réparer les ravages et les maux causés par tant de guerres accumulées et des fléaux de toute espèce. Venise eût peut-être fait refleurir plus tôt la Grèce, mais les seules traces qu'elle y a laissées se sont malheureusement empreintes sur les plus beaux monuments qui ont survécu. Cherchez-vous l'acropole d'Athènes, on vous répond que les Turcs en avaient fait une poudrière et qu'elle a sauté pendant un bombardement vénitien. Visitez-vous le Parthenon, l'on vous montre, à côté des plâtres qui remplacent les bas-reliefs enlevés par lord Elgin, ce dernier