— Vous buvez seule ? dit l’un des inconnus.
— Je vous invite si vous voulez. Justement, je cherche des amis pour souper.
— Ma foi, qui refuserait un souper en aussi charmante compagnie serait fou ! Nous serons volontiers ces amis, à moins qu’un seul vous suffise.
— Non, dit-elle, les deux. Même il me plairait d’avoir à ma table un troisième convive.
— C’est beaucoup !
— J’y tiens… Je ferai mon choix au dessert. Si cela vous plaît, ça va. Sinon, j’attendrai d’autres…
Ils se regardèrent.
Déplaçant son monocle, le premier s’inclina :
— Non pas, nous acceptons. Chacun attendra avec plus d’impatience la fin du souper… dans l’espoir d’être l’heureux mortel que vous désignerez.
— Ce ne sera pas banal, fit l’autre. Au moins vous êtes originale, vous !
— Vous trouvez ? demanda Laure ironique.
— Justement, voici un de nos amis. Il fera volontiers le troisième que vous attendez.
L’ami, joyeux, accepta. Il se tapait sur les cuisses, en disant : « Ça c’est rigolo, je la resservirai ! Au moins, toi, tu es une môme pas ordinaire. Je parie cent francs que c’est moi qui l’emporterai et qui finirai la nuit avec cette jolie gosse ! »
Elle se sentit froissée mais n’en laissa rien paraître.
À ce moment, elle vit Noël qui se dirigeait vers elle.
Il salua les trois hommes et s’adressant à Laure :
— Je vois, dit-il que vous avez déjà trouvé des soupeurs. Suis-je de trop ?
— Vous n’êtes pas de trop le moins du monde, mon cher. En votre qualité d’ami platonique, vous serez l’arbitre entre ces messieurs. Conduisez-nous donc, vous qui connaissez la maison, dans un salon où nous soyons seuls !
À la grande surprise de Laure qui le mit au courant de la proposition qu’elle avait faite aux trois amis, Noël ne s’indigna pas.
— Ce sera très amusant, dit-il, au contraire. Et je prévois un dénouement inattendu…
— Pourquoi inattendu ?
— Au moins pour deux de ces messieurs.
Un quart d’heure plus tard, tous cinq étaient attablés.
Laure présidait cet étrange souper. Elle dissimulait son