— Vous n’avez pas besoin de comprendre. En deux mots, je me marie, mais je veux un mariage qui n’en soit pas un.
— Un mariage blanc ! C’est drôle.
— Oui, n’est-ce pas ? Mais j’ai fait une convention avec mon fiancé.
— Il ne la tiendra pas.
— C’est pour cela que je suis venue ici. Je veux le surprendre, le confondre et lui signifier que je ne serai sa femme — en apparence — qu’à la condition qu’il s’en aille le jour même des noces de son côté et moi du mien.
— Étrange ! Et pourquoi l’épousez-vous ?
Laure poussa un soupir.
— Parce qu’il le faut !
— Vos parents vous y contraignent ?
— Je n’ai pas de parents, je suis orpheline.
— Il est riche ?
— Au contraire, c’est moi qui le suis.
— Alors, je ne comprends pas pourquoi, il le faut…
— Parce que, c’est absolument obligatoire.
Le compagnon de Laure regardait cette étrange jeune fille. Il cherchait à lire dans ses yeux, à deviner ce qui se passait dans son esprit.
Contrairement à ce qu’elle avait pensé, ce n’était pas un viveur, mais un littérateur, un romancier psychologique.
Au bout d’un instant il sourit et déclara :
— Petite fille, il y a un roman dans votre vie !
Furieuse d’être devinée, elle essaya de rire.
— Ah non ! Par exemple ! Non ! J’ai trop de dédain pour les hommes.
— Voyez-vous cela ! Cependant, une fois que vous serez mariée, votre époux peut exiger…
— Je prendrai mes précautions.
— Enfant que vous êtes ! Voulez-vous un bon conseil. Ne vous mariez pas.
— Merci du conseil, mais je ne le suivrai pas.
— Vous me faites de la peine.
— Vous êtes bien bon de vous intéresser autant à moi, que vous ne connaissiez pas il y a une heure et que vous vous apprêtiez à traiter comme une fille quelconque.
— Pardon ! Je ne pouvais pas supposer…
L’entretien fut à ce moment interrompu par des éclats de voix et des rires provenant d’une pièce voisine. La cloison séparant les deux cabinets était assez mince pour qu’on distinguât les paroles prononcées.