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tout oublié pour ne se souvenir que d’une chose : Laure consentait à le recevoir et à l’écouter.

Ce seul fait, à ses yeux, l’autorisait à croire qu’elle était déjà à lui… ou presque.

La jeune fille attendait, songeuse, celui qui allait venir.

Le timbre de l’entrée la fit sursauter… Elle ferma les yeux comme pour se retrouver seule avec elle-même et ne les rouvrit que lorsqu’elle perçut le bruit de la porte du salon où elle se trouvait au moment où Gérard pénétrait dans cette pièce.

La porte s’était refermée, ils étaient seuls.

Laure considéra longuement le jeune ingénieur, lequel, de son côté, ne détachait pas les yeux de celle qu’il aimait et qui lui apparaissait, à ce moment, plus désirable que jamais.

Ils s’examinaient l’un et l’autre, sans dire un mot, presque comme deux adversaires.

Laure rompit la première le silence qui pesait sur eux. Elle voulait échapper à cette sorte d’emprise qui lui semblait peser sur elle… Elle se sentait comme enveloppée dans un cercle d’effluves magnétiques que constituaient les désirs du jeune homme.

— Monsieur, dit-elle, vous avez demandé à me voir ?

Il était perdu dans le charme attirant qui se dégageait d’elle, ces quelques mots l’en firent sortir comme d’un beau rêve.

— Oui, mademoiselle, dit-il, madame votre tante a dû d’ailleurs déjà vous expliquer le motif de ma visite…

— Elle m’en a parlé vaguement.

— Vaguement ? Ne vous a-t-elle pas dit que j’aspirais au grand bonheur de vous épouser, que je vous aimais à la folie, que je ne pouvais vivre sans votre chère présence ?

Une fois de plus, elle s’était reprise. Ses lèvres s’ouvrirent dans un rire qu’elle voulait cinglant.

— Non, monsieur. Elle m’a dit plus simplement que vous vouliez demander ma main… Je l’avais chargée d’ailleurs de vous répondre en mon nom…

— Et cette réponse était ?

— Cette réponse que ma tante n’a pas voulu vous faire était la suivante : je ne suis pas disposée encore à me marier.

— Pas encore. Mais vous ne me dites pas « non » définitivement.

— On m’a défendu de vous dire « non » pour ne pas vous désespérer.

Ces paroles n’avaient rien d’encourageant, mais Gérard