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D’abord, il restait tout interloqué de ce que lui racontait la jeune femme :

— Non, disait-il. Non… C’est invraisemblable !… Tu t’es offerte à lui… et il a refusé…

— Oui, mon vieux… Il a refusé. Ça te la coupe, ça, hein ! Eh bien, moi, j’en étais baba, aussi, quand il m’a dit qu’il ne voulait pas faire une crasse pareille à un ami comme toi

— Il y a de quoi !

— D’autant plus, mon petit, qu’il ne faut pas croire que je lui aie déplu… Au contraire, il avait parfaitement le béguin pour moi… Seulement, voilà, au moment psychologique, il a dit : « Je ne tromperai pas mon ami »… Je l’admire, moi, ce type-là…

Roger se mit à sourire :

— Tu l’admires ! dis-tu… Un homme qui a repoussé tes avances…

— Parfaitement… et qui pleurait à la seule idée que sa femme pouvait le tromper… car il aime beaucoup sa femme, tu sais… Et si jamais il découvrait la vérité, je crois bien qu’il ferait un malheur !

— Un malheur ?

— Oui… Ce type-là, c’est un homme à se tuer dans une circonstance pareille. Aussi, mon vieux, si j’ai un conseil à te donner, et à la petite dame blonde aussi, c’est de prendre bien vos précautions et de ne pas faire d’imprudence qui le mettrait sur la voie…

— Sois tranquille… Ton conseil est bon… Nous n’en ferons pas.

En quittant Irène, Roger était perplexe… L’attitude inattendue d’Anselme le plongeait de nouveau dans ses hésitations ; de nouveau, le même cas de conscience se posait pour lui… Certes, il aimait beaucoup sa maîtresse, il aurait un immense chagrin s’il devait se séparer d’elle, mais cette existence de dissimulation perpétuelle, cette intimité de chaque jour avec l’homme qu’il trompait, tout cela lui pesait plus que jamais…

Il avait repris tout pensif le chemin de son logis…