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— Tiens, fit-il, après s’être débarrassé de son chapeau et de son pardessus, Roger n’est pas encore arrivé ? (Nous savons qu’Anselme avait pris l’habitude d’appeler le lieutenant par son prénom.)

— Non… répondit Gabrielle étonnée, mais il n’est pas en retard… D’habitude, il ne vient pas si tôt…

— Cela dépend… Enfin, je suppose qu’il est retenu ailleurs.

— Peut-être.

— Oh ! Sûrement. Et je me doute bien de ce qui le retient. Prenant un air entendu, Anselme sourit…

— Comment, tu te doutes bien ?… dit sa femme.

— Parbleu. Tu le demandes ? Eh bien ! Mais, tu ne crois pas que notre ami vive comme un moine… Et je suis certain qu’il est retenu par une jolie personne que j’ai déjà rencontrée avec lui, une jeune femme brune, très bien ma foi…

— Tais-toi donc. Tu ne sais pas ce que tu dis…

— Je ne sais pas ce que je dis ?… Par exemple…

La pauvre Gaby, qui n’a pas encore vu le piège, est tout énervée. Son mari a vu juste, en voulant exciter sa jalousie… Elle pense que véritablement Roger serait le plus abominable des traitres s’il la trompait ainsi…

Quant à Anselme, il appuie encore, et il ajoute :

— D’ailleurs, je ne connais que cette maîtresse à notre ami, mais si délicieuse soit-elle, je sais qu’il en a d’autres. C’est un gaillard à bonnes fortunes…

Gaby s’impatiente :

— C’est du propre ! s’écrie-t-elle.

— Comme tu t’indignes ! Qu’est-ce que cela peut te faire que Roger ait une ou plusieurs maîtresses… ?

Cette fois l’attaque est trop directe, la jeune femme l’a vue venir, et, tout d’un coup, elle se méfie, il lui vient à l’idée que son mari peut avoir des soupçons. Aussi reprend-elle habilement :

— Évidemment, ça ne me regarde pas. Mais M. Brémond est reçu ici… Et il me déplairait de lui retirer mon estime… Or, je trouve naturel qu’un homme ait une maîtresse mais s’il en a plusieurs, ce n’est pas la même chose… il les