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— C’est votre faute aussi ! Aucun client ne m’a jamais embrassé.

— Je n’en sais rien !

— Oh ! Oh ! Vous êtes jaloux ! Cela vous va mal.

— Oui, je suis jaloux.

— Vous n’en avez pas le droit.

— Je le prends. S’il y a une belle fille dans ma maison, j’entends que ce soit pour moi et non pour d’autres.

— Voilà que vous m’injuriez maintenant. Rien ne vous permet de dire que je sois pour d’autres.

— Tu es pour d’autres si tu n’es pas pour moi. Voilà ce que j’ai à te dire. Et, si tu veux que j’oublie l’injure que tu m’as faite tout à l’heure, j’entends que ce soir, sans plus attendre, tu laisses ta porte ouverte, afin que sur le coup de minuit j’aille te retrouver dans ta chambre.

La servante était toute interdite de l’attitude imprévue de son patron.

— Je comprends mal, dit-elle.

— Tu comprends très bien.

— Vous ne parlez pas sérieusement.

— Très sérieusement. Je ne peux plus me passer de toi. Tu me fais trop envie !… Et je ne sais ce qui me retient de te demander sur-le-champ ce que j’exige pour ce soir.

— Sur-le-champ !

— Mais je me contenterai pour l’instant d’un baiser. La nuit que nous passerons ensemble n’en sera que meilleure.

Et, de nouveau, Honoré agrippa Adèle et l’embrassa, tandis qu’elle se débattait, réussissant cette fois à poser ses lèvres sur celles de la jeune fille.

— Donne-moi encore une gifle, si tu l’oses !

Adèle se contenta de hausser les épaules.

— Ça ne compte pas, dit-elle, quand c’est pris de force !

Mais l’hôtelier lui répondit :

— Allons, fâche-toi ! Voyons… Cela me rend amoureux davantage. C’est du piment que tu mets dans ma sauce !

— Eh bien ! Je ne me fâcherai pas, puisque vous le désirez.

— Te voilà plus complaisante !… Il n’y a tel qu’un baiser pour adoucir une fille rebelle !

— Vous n’avez pas peur !

— De quoi aurais-je peur ? De ma femme ?

— Peut-être !… Si elle vous surprenait tout de même ?

— Il n’y a pas de danger ! Elle ne se doutera de rien, et une