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CONTE DE L’AVENIR

LE DERNIER PAPE


C’était, dans le quartier du Vatican, derrière les ruines de Saint-Pierre, une maison d’assez pauvre apparence, et fort vieille, car elle portait, sur la pierre du fronton, la date de l’an 2077. Tout ce quartier de Rome, vous le savez, a gardé son aspect d’un autre âge, et il fait dans la ville un îlot de délabrement et de misère, avec des rues tristes, des logis malsains ; maintes fois, déjà, le Conseil a délibéré sur le projet d’abattre ces masures, hautes à peine de dix étages, où des gens sans aveu consentent seuls à vivre : mais le temps passe, et les taudis restent debout.

La profession médicale nous amène à voir d’étranges lieux : je fus appelé là pour y visiter un malade, et je dois avouer que, malgré ma curiosité pour les choses du vieux temps, je m’aventurais pour la première fois dans cette région de la ville. Un méchant ascenseur électrique m’arrêta au premier étage, et je me demandais à quel degré de misère il fallait en être réduit, pour habiter si loin des hauteurs respirables, si près de terre, et presque déjà vers la tombe.

Pourtant, dès mon entrée dans l’appartement du malade, j’eus la surprise d’y constater quelque richesse : il était encombré de bibelots dont plusieurs semblaient d’un grand prix, mêlés à d’autres dont l’unique valeur était leur ancienneté. On se serait cru dans le réduit d’un antiquaire ou d’un savant ; au second coup d’œil, je diagnostiquai, dans cette sorte de petit musée, l’esprit et la main d’un théographe. En effet, les