Page:Edmond Haraucourt Cinq mille ans 1904.djvu/7

Cette page a été validée par deux contributeurs.

» Ces terrains de l’époque tertiaire, messieurs, eurent ici une fortune triste et brève : apparus les derniers, ils disparurent les premiers, et la mer, qui les donna tard, les reprit tôt. Mais ces considérations nous entraîneraient loin dans le recul des âges, et ne se trouvent rentrer, en surplus, ni dans notre compétence spéciale, ni dans le dessein des études qui nous rassemblent aujourd’hui et qui doivent faire l’objet de notre promenade. Je ne me suis, d’ailleurs, permis d’aborder cette question géologique que de la façon la plus sommaire, et pour vous faciliter la compréhension des causes naturelles qui ont collaboré, non seulement à la déchéance, mais encore à la disparition des peuples autrefois célèbres dont l’histoire occupera notre journée.

» Messieurs, Paris était là, sous vos pieds : une excursion en barque sur ces eaux peu profondes vous procurera tout à l’heure, si le temps reste clair, l’amusement de contempler, sur leur lit de vase et d’alluvions, les saillies rocheuses maintenant recouvertes d’algues et de goémons et qui sont en réalité les ruines de cette ville antique. Elle était vaste, relativement du moins : les sept îles que nous voyons surgir des flots en furent les sept collines. Elle remplissait cette enceinte, mais sa population était fort peu nombreuse, car on estime à deux millions à peine le nombre des citoyens qui l’habitaient : comparée à nos villes moderne, celle-là n’était donc qu’un village, et l’on s’étonnerait de l’importance qu’elle put prendre dans l’histoire du monde, si l’on ne se rappelait combien les conditions de l’existence ont changé depuis lors, et différaient des nôtres ; étalée sur sa plaine, cette ville était basse ; ses maisons, de vingt à trente mètres au plus, ne comportaient que huit ou dix étages, et ses monuments les plus hauts n’atteignaient que le double, soit environ soixante et soixante-dix mètres : tous, d’ailleurs, étaient bâtis selon la mode paléontique, c’est-à-dire en pierre, et c’est ce qui va nous rendre particulièrement intéressante l’étude de ces vestiges, bien caractéristiques de l’âge qui porte leur nom : « Âge de la pierre sculptée. »