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Adrienne ne fut pas sans remarquer que son jeune amant ait éprouvé une grande contrariété.

Couchée à côté de lui, câline, elle le questionna.

— Je n’ai rien, disait-il… Je n’ai rien.

— Si… c’est une lettre que tu as reçu qui t’ennuie. Ça ne va pas chez toi ?

— Mais si… mais si… il n’y a rien, je t’assure.

— Quand on dit « il n’y a rien » comme ça, c’est au contraire qu’il y a beaucoup de choses…

Et, ayant un doute, elle demanda :

— Alfred, montre-la-moi, cette lettre…

— Oh ! Elle n’avait pas d’importance…

— Raison de plus alors pour me la laisser lire…

— Je ne sais plus ce que j’en ai fait…

— Je crois bien, moi, que tu l’as mise dans la poche de ton veston.

— Oui, mais je l’ai déchirée après…

— Ça, ça n’est pas vrai !… Oh ! Il y a un secret dans cette lettre, que je ne dois pas connaître… Alfred… Est-ce que, toi aussi, déjà ?

— Oh ! non ! Adrienne, je te jure… Mais c’est bien comme je te le dis, j’ai déchiré la lettre.

— Et moi je parie tout ce que tu veux que je la retrouve dans la poche de ton veston.

Alfred n’avait pas eu le temps de protester que, avec vivacité, Adrienne avait sauté en bas du lit et s’était sauvée dans la pièce à côté…

Le jeune homme, affolé, courait après elle…

Mais sa maîtresse plus vive que lui, revenait bientôt, tenant la lettre dans ses mains.

Alfred alors prit un parti héroïque.

Il se jeta à genoux devant Adrienne, disant :

— Je te demande pardon… Je vais tout te dire…

Et il raconta tout, en effet, ses fiançailles avec Aglaé, et le complot ourdi par ses parents pour faire donner une dot par la tante de Paris, et comment sa mère le harcelait dans ses lettres pour qu’il arrivât enfin à un résultat…

Adrienne écoutait, tenant toujours la lettre dans sa main.