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ORDONNANCE DE LA MARINE

XLV. N’entendons toutefois priver nos ſujets de la faculté de les ſtipuler propres à leurs perſonnes &, aux leurs de leur côté & ligne, ainſi qu’il ſe pratique pour les ſommes de deniers & autres choſes mobilaires.

XLVI. Dans les ſaiſies des eſclaves ſeront obſervées les formalités preſcrites par nos Ordonnances & les coutumes pour les ſaiſies des choſes mobiliaires. Voulons que les deniers en provenans ſoient diſtribués par ordre des ſaiſies : & en cas de déconfiture, au ſol la livre, après que les dettes privilégiées auront été payées, & généralement que la condition des eſclaves ſoit réglée en toutes affaires, comme celles des autres choſes mobiliaires aux exceptions ſuivantes.

XLVII. Ne pourront être ſaiſis & vendus ſéparément, le mari & la femme & leurs enfans impubères, s’ils ſont tous tous la puiſſantce du même maître ; déclarons nulles les ſaillſies & ventes qui en ſeront faites, ce que nous voulons avoir lieu dans les aliénations volontaires, ſur peine, pour les aliénateurs d’être privés de celui ou de ceux qu’ils auront gardés qui ſeront adjugés aux acquéreurs, ſans qu’ils ſoient tenus de faire aucun ſupplément du prix.

XLVIII. Ne pourront auſſi les eſclaves travaillant actuellement dans les ſucrecrîes, indigoteries & habitations, âgés de 14 ans & au-deſſus juſqu’à ſoixante ans, être ſaiſis pour dettes, ſinon pour ce qui ſera dû du prix de leur achat, ou que la ſucrerie, ou indigoterie, ou habitation dans laquelle ils travaillent ſoit ſaiſie réellement ; défendons a peine de nullité de procéder par ſaiſie réelle & adjudication par décret ſur les ſucreries, indigoteries, ni habitations, ſans y comprendre les eſclaves de l’âge ſuſdit & y travaillant actuellement.

XLIX. Les fermiers judiciaires des fucrerîes, indigoteries ou habitations ſaiſies réellement conjointement avec les eſclaves, ſeront tenus de payer le prix entier de leur bail, ſans qu’ils puiſſent compter parmi les fruits & droits de leur bail qu’ils percevront, les enfans qui ſeront nés des eſclaves pendant le cours d’icelui qui n’y entrent point.

L. Voulons que nonobſtant toutes conventions contraires, que nous déclarons nulles, que leſdïts enfans appartiennent à la partie ſaiſie ſi les créanciers ſont ſatisfaits d’ailleurs, ou à l'adjudicataire s’il intervient un décret, & qu’à cet effet, mention ſoit faite dans la dernière affiche avant l'interpoſîtion du décret des enfans nés des eſclaves depuis la ſaiſie réelle ; que dans la même affiche il ſoit fait mention des eſclaves décédés depuis la ſaiſie réelle dans laquelle ils auront été compris.

LI. Voulons pour éviter aux frais & aux longueurs des procédures, que la diſtribution du prix entier de l’adjudication conjointement des fonds & des eſclaves, & de ce qui proviendra du prix des baux judiciaires, ſoit faite entre les créanciers ſelon l'ordre de leurs privilèges & hypothèques, ſans dîſtinguer ce qui eſt provenu du prix des fonds, d’avec ce qui eſt procédant du prix des eſclaves.

LII. Et néanmoins les droits féodaux & ſeigneuriaux ne ſeront payés qu’à proportion du prix des fonds.

LIII. Ne ſeront reçus les lignagers & les Seigneurs féodaux à retirer les fonds décrétés, s'ils ne retirent les eſclaves vendus conjointement avec les fonds, ni les adjudicataires à retenir les eſclaves ſans les fonds,

LIV. Enjoignons aux gardiens nobles de bourgeois, uſufruitiers, amodiatteürs & autres jouiſſans des fonds, auxquels ſont attachés des eſclaves qui travaillent de gouverner leſdits eſclaves comme bon pères de familles, ſans qu’ils ſoient tenus après leur adminiſtratîon de rendre le prix de ceux qui ſeront décédés ou diminués par maladie vieilleſſe ou autrement ſans leur faute, & ſans qu’ils puiſſent auſſi retenir comme les fruits de leurs profits, les enfans nés deſdits eſclaves durant leur adminiſtration, leſquels nous voulons être conſervés & rendus à ceux qui en ſeront les maîtres & propriétaires.

LV. Les maîtres âgés de 20 ans, pourront affranchir leurs eſclaves par tous actes entre vifs ou à cauſe de mort, ſans qu’ils ſoîent tenus de rendre raiſon de leur affranchiſſement ni qu’ils ayent beſoin d’avis de parents, encore qu’ils ſoient mineurs de 25 ans.

LVI. Les eſclaves qui auront été faits légataires univerſels par leurs maîtres, ou nommés exécuteurs de leurs teſtamens, ou tuteurs de leurs enfans, ſeront tenus & réputés, & les tenons & réputons pour affranchis.

LVII. Déclarons leurs affranchiſſemens faits dans nos ^iſles, leur tenir lieu de naiſſançe dans nos rues, & les eſclaves affranchis n’avoir beſoin de nos lettres de naturalité pour jouir des avantages de nos ſujets naturels dans notre Royaume, terres & pays de notre obéiſſance, encore qu’ils ſoyent nés dans les pays étrangers-

LVIII. Commandons aux affranchis de porter un reſpect ſingulier à leurs anciens maîtres, à leurs veuves & à leurs enfans, en ſorte que l’injure qu’ils auront faite ſoit punie plus grièvement que ſi elle étoit faite à une autre perſonne : les déclarons toutefois francs & quittes envers eux de toutes autres charges, ſervices & droits utiles que leurs anciens maîtres voudroient prétendre, tant ſur leurs perſonnes que ſur leurs biens & ſucceſſions en qualité de patrons.

LIX. Octroyons aux affranchis les mêmes droits, privilèges & immunités dont jouiſſent les perſonnes nées libres ; voulons qu’ils méritent une liberté acquife, dé& qu’elle produiſe en eux, tant pour leurs perſonnes que pour leurs biens, les mêmes effets que le bonheur de la liberté naturelle cauſe à nos autres ſujets.

LX. Déclarons les confiſcations & les amendes, qui n’ont joint de deſtination particulière par ces préfentes, nous appartenir, pour être payées à ceux qui ſont prépoſés à la recette de nos revenus. Voulons néanmoins que diſtraction ſoit faite du tiers deſdites confiſcations & amendes au profit de l'Hôpital établi dans l’iſle où elles auront été adjugées.

Si donnons en mandement à nos amis & féaux les gens tenans notre Conſeil ſouverain établi à la Martinique, Guadeloupe, Saint-Chriftophe, que ces préſfentes ils ayent à faire lire, publier & enregiſtrer, & le contenu en icelles garder & obſerver de point en point ſelon leur forme & teneur, ſans y contrevenir, ni permettre qu’il y ſoit contrevenu en quelque ſorte & manière que ce ſoit, nonobſtant tous Édits, Déclarations, Arrêts ; uſages à ce contraires, auxquels nous avons dérogé