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çant ne considérait pas une belle maison toute neuve comme le nec plus ultra du bonheur, et il n’avait pas l’intention de vivre dans une complète inaction, au sein du luxe et de l’abondance. Une existence oisive était aussi incompatible avec ses goûts que contraire à ses principes. Il aimait beaucoup les enfants, et, comme il n’avait pas de fils, il prit la résolution d’adopter un de ses parents. Dans cette intention, il invita ses deux neveux à venir passer quelque temps auprès de lui, espérant trouver ainsi l’occasion d’apprécier leur caractère et de reconnaître leurs bonnes et leurs mauvaises dispositions.

Henri et Benjamin étaient âgés d’environ dix ans. Ils avaient reçu une éducation tout opposée. Henri appartenait à la branche aînée de la famille. Son père, qui vivait en grand seigneur, dépensait au delà de ses revenus, et le jeune Henri, à l’exemple des serviteurs de la maison, aux soins desquels son enfance avait été abandonnée, avait contracté de bonne heure des habitudes de prodigalité. On lui avait dit « qu’un homme comme il faut ne doit jamais s’inquiéter de rien épargner, » et il était malheureusement imbu de ce préjugé, que la dissipation est un signe de générosité, et l’économie une marque d’avarice.

Benjamin, au contraire, avait pris des habitudes de soin et de prévoyance. Son père ne pos-