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de repos, et que, depuis la révolte, ils vivaient complètement dans la chambre de l’arrière, buvant les vins, festoyant avec les provisions du capitaine Barnard, et ne donnant à la manœuvre du bâtiment que l’attention strictement nécessaire.

Ces circonstances tournèrent à l’avantage d’Auguste et au mien ; car autrement il lui eût été impossible d’arriver jusqu’à moi. Dans cette conjoncture, il poursuivit son projet avec confiance. Cependant, le point du jour arriva qu’il n’avait pas encore achevé la seconde partie de son travail, c’est-à-dire la fente à un pied environ au-dessus de la première ; car il s’agissait de faire une ouverture suffisante pour lui livrer un passage facile vers le faux pont. Une fois arrivé là, il parvint sans trop de peine à la grande écoutille inférieure, bien que dans cette opération il lui fallût grimper par-dessus des rangées de barriques d’huile empilées presque jusqu’au second pont, et lui laissant à peine un passage libre pour son corps. Quand il eut atteint l’écoutille, il s’aperçut que Tigre l’avait suivi en se faufilant entre deux rangées de barriques. Mais il était alors trop tard pour espérer d’arriver jusqu’à moi avant le jour, la principale difficulté consistant à passer à travers tout l’arrimage dans la seconde cale.

Il résolut donc de remonter et d’attendre jusqu’à la nuit. Dans ce but, il commença à lever l’écoutille ; c’était autant de temps économisé pour le moment où il devait revenir. Mais à peine l’eut-il levé que Tigre bondit sur l’entre-bâillement, flaira avec impatience pendant un instant, et puis poussa un long gémissement, tout en grattant avec ses pattes, comme s’il voulait arracher la trappe. Il